Questions techniques par catégorie de déchets d’origine artisanale

Les très petites entreprises sont confrontées à des difficultés particulières pour la gestion de leurs déchets. Vous trouverez ci-après une présentation synthétique de la situation générale à laquelle elles doivent faire face pour chaque catégorie de déchets : inertes, banals et dangereux.

En outre, certains sujets transversaux ont également été traités pour mettre en lumière les pistes de collaboration possible avec les collectivités :

 

Les déchets inertes

Les déchets inertes sont essentiellement produits par les activités du bâtiment. On y trouve des gravats, des tuiles, des grès,… etc. Il s'agit d'ailleurs dans leur grande majorité de déchets de dépose, c'est à dire de matériaux qui appartenaient originellement au propriétaire du bâtiment en rénovation mais que l'entrepreneur accepte de prendre en charge. On notera ici que les entreprises artisanales du bâtiment travaillent essentiellement en rénovation et qu’elles jouent souvent un rôle de collecteur de déchets et évitent ainsi la dispersion des déchets des particuliers. Les déchets inertes ne présentent pas de problème particulier de collecte puisque l'entrepreneur assure naturellement son transport du lieu de production, le chantier, jusqu'au lieu d'élimination.

C'est là que le problème se pose puisqu'il y a de moins en moins de décharges de classe III, légalement prévues pour l'accueil de ce type de déchets. En effet, soumises à l’autorisation du Maire, sans prescriptions particulières obligatoires, elles ont très souvent évolué en décharges brutes ou sauvages qui se voient progressivement interdites et soumises à une obligation de remise en l'état. Les sites restants sont alors trop peu nombreux et donc très souvent éloignés des chantiers. Face à cette réalité les entreprises ont besoin d'un bon maillage de décharges de classe III dont l'entretien et la gestion éviteraient toute dérive néfaste à leur pérennité.

Les déchetteries sont également un site d'évacuation des déchets inertes. Elles répondent plutôt bien aux besoins des petites entreprises du second œuvre du bâtiment qui ne détiennent que de très petites quantités de gravats. Or, les situations locales sont très disparates : elles vont de l'absence de déchèterie à une tarification dissuasive du service.

Un dialogue devrait s’instaurer entre les collectivités et les représentants de l’artisanat pour réfléchir aux possibilités d’ouvrir de nouvelles décharges de classe III et pour harmoniser les conditions d’accès en déchèteries, du moins par département.

 

Les déchets banals

Les déchets industriels banals (DIB) sont produits par l'ensemble des activités, qu’elles soient du domaine de l’alimentaire, de l’automobile, des arts graphiques, des métaux, du bâtiment et des services (coiffure, fleuristes,…). On y trouve toute sorte de produits à base de papier, de carton, de bois, de plastique, de métaux et de caoutchouc.

Ces déchets ne présentent pas de graves problèmes en termes de filières d'élimination en France.

En revanche, hormis pour les activités du bâtiment, pour qui la collecte des DIB est assurée par les entreprises elles-mêmes, et pour les petits commerces et les artisans de proximité (métiers de bouche, coiffeurs, fleuristes,…) qui utilisent le service des ordures ménagères, la collecte des DIB est souvent un problème pour les entreprises artisanales.

D'abord un problème de stockage pour les petites entreprises dont les surfaces sont consacrées à la production ou à la réparation et chez qui les DIB représentent un très fort encombrement. Or, il faut pouvoir stocker longtemps pour limiter les coûts de collecte qui sont souvent très importants, notamment quand le prestataire privé ne se déplace que pour une entreprise.

Les collectivités proposent, elles aussi, de plus en plus souvent la collecte des DIB des entreprises en porte à porte (extension du service de collecte des OM) contre le paiement d'une redevance spéciale. Cette redevance apparaît hélas comme un impôt supplémentaire aux yeux des entreprises. Il est donc indispensable d'expliquer à quoi correspondent les coûts, et nécessaire de donner aux entreprises le choix parmi plusieurs modes de collecte afin d'éviter un sentiment de "prise au piège".

Pour les DIB des petites entreprises, l’accès aux déchèteries représente une autre offre de service intéressante. Ces structures offrent aux artisans une solution de proximité pour une grande variété de déchets.

Un dialogue devrait s’instaurer entre les collectivités et les représentants de l’artisanat pour définir les modalités de mise en œuvre de la redevance spéciale et pour convenir des conditions d’ouverture des déchèteries aux petites entreprises.

 

Les déchets dangereux

Les déchets dangereux les "DIS" produits par la grande majorité des activités. Les DIS comprennent tous les produits toxiques usagés mais également tous les emballages et accessoires avec lesquels ils ont été en contact. On parle alors d'emballages et de déchets souillés.

Comme pour les DIB, la France est plutôt bien équipée en termes de site de traitement des déchets spéciaux, bien qu’il y ait quelques disparités régionales compensées par des centres de regroupement. Par contre, la grande majorité des très petites entreprises a des difficultés à faire appel, seule, à un de ces prestataires spécialisés.

Nous avons ainsi recensé trois scénarios de gestion collective :

  • La collecte en porte à porte dans le cadre d'un circuit de ramassage organisé.
  • La collecte sur des points de regroupement de proximité comme par exemple les coopératives, les fournisseurs de produits ou les déchetteries. Cette solution, pertinente d’un point de vue technique et financier, est souvent délicate à mettre en œuvre à cause de la réglementation puisque tout regroupement de déchets spéciaux est soumis à autorisation préfectorale.
  • Le regroupement mobile comme cela se fait déjà pour les particuliers dans certaines communes, avec le passage et le stationnement d'un camion, à échéance régulière, sur un emplacement défini à l'avance.

Ces diverses possibilités sont à évaluer en tenant compte des situations de chaque territoire. Une fois les choix techniques effectués il faut coordonner la mise en œuvre des solutions et assurer leur animation sur le terrain.

Bien que les collectivités n’aient aucune obligation de collecter et traiter les déchets dangereux des entreprises, une collaboration peut s’établir entre la collectivité et les représentants de l’artisanat pour aider à la mise en place d’une solution satisfaisante pour les très petites entreprises.

Après avoir balayé les problématiques par catégories de déchets il faut parler des questions transversales.

D'abord le manque d'information et de formation des entreprises en matière de gestion des déchets, non seulement du point de vue de la réglementation mais également en termes de bonnes pratiques et de coûts. Il faut insister ici non seulement sur la formation des chefs d'entreprises mais également celle des salariés qui sont en contact direct avec les déchets. Les Chambres de Métiers et de l’Artisanat ont l’habitude de ce type de formation et peuvent, dans le cadre d’un partenariat avec une collectivité, la proposer aux artisans du territoire en question.

Puis, le besoin d'organisation, de coordination et d'animation des opérations de gestion collective des déchets. Par manque d'expertise et de disponibilité les entreprises sont en attente d'accompagnement dans ce domaine. Là aussi un partenariat entre la Chambre de Métiers et de l’Artisanat et la Collectivité concernée peut permettre de trouver une réponse optimale tenant compte des compétences et de la volonté des uns et des autres.

Ensuite, la question du coût : C’est comme toujours l’écueil le plus important. Il faut comprendre que l’on part d’une réalité dans laquelle la majorité des entreprises artisanales n’a jamais véritablement payé la collecte et l’élimination de ses déchets. Elles découvrent aujourd'hui que de nouvelles dépenses s'imposent à elles. Leur première réaction est de dire qu’elles payent déjà beaucoup d’impôts et notamment la taxe professionnelle et une Taxe ou une Redevance pour l'enlèvement des ordures ménagères. Elles ont donc du mal à comprendre pourquoi elles devraient payer deux fois pour la même chose : une fois sous forme d'impôt et une autre sous forme de prestation.

Quand on leur recommande de répercuter le coût aux clients, elles expliquent que ce n'est pas si facile. En effet, le client n’a pas l’habitude de payer cette partie de la prestation. Et même si les Français sont sensibles à l’environnement, ils ne semblent pas encore prêts à payer un service ou un produit “ propre ” plus cher qu’un service classique.

La question des coûts doit donc être traitée, par les collectivités, en tenant compte de cette réalité.

Enfin, et ce dernier point est lié au précédent, une grande majorité des entreprises se préoccupent de la distorsion de concurrence que peut générer la gestion des déchets. En effet, les chefs d'entreprises qui s'obligent à de bonnes pratiques ne comprennent pas comment certains de leurs collègues peu scrupuleux peuvent, non seulement poursuivre leurs mauvaises pratiques sans être inquiétés, mais également gagner des marchés grâce à des tarifs forcément moins élevés.

Seule l'existence d’exigences commerciales ou réglementaires peut permettre d'éviter le désengagement des entreprises volontaires. Il faut donc imaginer, dans le cadre de la collaboration collectivité/chambre de métiers, un dispositif incitatif qui puisse non seulement convaincre les entreprises de faire le pas, mais également de pérenniser leur engagement.